BLOG TAKEOVER: This year our French Studies Resident Abroad students are taking over the blog. They have decided to share social, cultural and political aspects of the French-speaking world with us. Bonne lecture!
Aimee Cartwright
Depuis que les Français sont arrivés au Québec au 17ème siècle, apportant la langue française, une communauté francophone avec un fort sentiment de résistance n’a cessé de se développer.
On pourrait dire que la langue française est au cœur de l’histoire tumultueuse de cette province du Canada de l’est. Bien qu’on associe actuellement le Québec à la langue française (78.1% des habitants la parlent), cette dernière n’a pas toujours été si appréciée au Canada.
Jusqu’aux années 60, l’Église Catholique (principalement dirigée par des anglophones) prenait la plupart des décisions relatives à la gestion du Québec ; elle contrôlait l’économie et l’éducation.
Toutefois, tout cela a changé dans les années 60, quand les francophones ont incité une révolution puissante : la Révolution Tranquille.
Après avoir vécu dans une société anglophone qui n’appréciait pas l’unique culture québécoise, les Canadiens francophones en ont eu assez. Ils ont alors lutté pour plus de pouvoir et plus de reconnaissance de la langue française. Après tout, ils étaient fiers d’avoir créé une version canadienne du français : le québécois. Cette lutte pour plus d’autonomie langagière a transformé la politique et la loi.
La Politique
Après que le nouveau parti politique ‘Parti Québécois’ (1968) a perdu l’élection de 1973, la lutte pour plus de pouvoir québécois a continué. Ce parti politique se battait pour l’indépendance québécoise ainsi que la reconnaissance du français comme langue officielle, qui apporterait plus de prestige à la variété québécoise. Résultat : une victoire stupéfiante pour le PQ en 1976.
Cela étant dit, les anglophones n’ont pas cessé pour autant de s’opposer aux efforts des francophones. Autrement dit, il y a toujours un « sentiment anti-québécois » au Québec : en 2009, l’ancien candidat du Nouveau Parti Démocratique du Québec, Dayleen Van Ryswyk, a déclaré que les Canadiens francophones sont universellement détestés.
Comment pourrions-nous expliquer cette haine envers les francophones du Québec ? C’est une question compliquée, mais on pourrait l’attribuer à la psychologie humaine : on aime s’identifier à un groupe spécifique et rester méfiant des autres.
En dépit de cette discrimination, les francophones ont continué de promouvoir leur langue. Il est indéniable que leurs efforts ont payé : en 2019, le ministre de l’éducation Jean-Francois Roberge a révélé qu’il souhaitait transformer trois écoles anglaises en écoles françaises, défavorisant les élèves anglais.
Par ailleurs, un incident discriminatoire au Centre hospitalier de l’Université de Montréal a fait la une en 2018. Un homme polonais, qui habite à Montréal depuis 30 ans, n’a pas pu recevoir de soins à l’hôpital pour la simple raison qu’il voulait parler avec les médecins en anglais. Légalement, les hôpitaux québécois ne doivent pas fournir de services en anglais.
Comme on peut le constater, le gouvernement québécois a actuellement tendance à favoriser la langue française au détriment de l’anglais.
La Loi
En 1977, grâce aux efforts des Canadiens francophones et du Parti Québécois, La Charte de la Langue Française est née. Cela signifie que la langue française est désormais reconnue comme la langue officielle du Québec. De nos jours, on peut voir encore l’influence de cette loi dans les lieux de travail, les écoles et même les panneaux de signalisation, où le français est systématiquement utilisé.
Au sein d’un pays anglophone, les francophones du Québec ont réussi à créer une culture unique qui dépend de la langue française. Pourtant, ce n’est pas tout. L’Office québécois de la langue française fait tout son possible pour exclure les mots anglais du québécois. Par exemple, ils ont remplacé le mot « podcast » avec « baladodiffusion », et « hamburger » avec « hambourgeois ».
Sans doute, cela crée une variété de français « pure », dépourvue de toute autre influence linguistique étrangère. Si on compare le québécois au français de l’Hexagone, il est évident que l’anglais a plus d’influence sur ce dernier : les Français emploient les mots anglais « smartphone », « email » et « marketing ». En permettant à ces mots d’entrer dans la langue, on accepte la perte de la « pureté » du français (on refuse donc, dans le même mouvement, son évolution). [1] Puisque le Québec essaie d’interdire ces mots, la province réussit à promouvoir la langue française autant que possible.
Le Futur du québécois
Le québécois apparaît donc comme une variété que l’on pourrait caractériser de « pure ». Il faut néanmoins ajouter qu’il y a quelques exceptions. Curieusement, malgré la résistance des Canadiens francophones face à l’anglais, quelques mots anglais sont entrés dans le québécois, comme par exemple : « truster », « welcome », « oh boy! ».
On ne peut pas ignorer que le Québec est entouré d’une forte influence anglaise ; la culture américaine domine le monde entier, et le Québec ne fait pas exception. En fait, on pourrait qualifier le québécois d’une langue hybride. En 2011, le film canadien-francais Monsieur Lazhar (réalisé par Philippe Falardeau) nous a montré le fossé entre les cultures des francophones au Québec et en France. Bien que les personnages parlent la langue française, certains Français se sont plaints de ne pas pouvoir toujours comprendre la variété québécoise, dû notamment à l’accent et au vocabulaire. Évidemment, le québécois est plus anglais que vous ne le croyez.
Peut être que cela nous démontre le potentiel de l’unité entre les deux principales langues du Canada. Est-il possible d’être fier de sa culture anglophone et francophone en même temps ?
D’une part, cela semble possible. Les deux cultures coexistent et il y a beaucoup de québécois qui parlent les deux langues et vivent les deux cultures. D’autre part, étant donné l’histoire de la résistance au Québec, c’est une question incertaine. Au fil des années, les deux camps (les anglophones et les francophones) ont été victimes de discrimination, et cela ne va pas s’arrêter de sitôt. Alors que le Parti Québécois est au pouvoir, on note une certaine préférence pour les francophones, et si le prochain gouvernement est majoritairement anglophone, le sentiment de résistance québécois sera renforcé. Dans tous les cas, on espère que la variété québécoise sera protégée dans toute sa richesse.
[1] On peut cependant constater que l’évolution des langues est un phénomène naturel. Prenons l’exemple de l’anglais : cette langue aurait-elle été aussi riche qu’elle ne l’est maintenant s’il n’y avait pas eu l’influence du français (entre autres) ? Peut-être que non, et cela nous suggère que la résistance contre toute influence étrangère n’est pas toujours une bonne chose.